Peur de vexer, de sembler égoïste ou d’aller au conflit… Savoir dire « non » n’est pas forcément simple. Pourtant, ce mot est indispensable pour vivre une vie sereine en se protégeant des demandes excessives.
Mais alors, pourquoi est-ce si dur pour certains de s’affirmer et comment le faire ? Voici quelques éléments de réponse et conseils pour vous éviter de dire oui à tout.
Pourquoi est-ce si dur de dire « non » ?
Selon une enquête Ipsos, la résolution de l’année 2024 pour 41 % des Français n’est autre que… « oser dire non ». Preuve que ce simple mot n’est pas facile à prononcer pour beaucoup d’entre nous. Savoir dire « non » au travail comme dans la vie personnelle s’accompagne ainsi d’une certaine culpabilité, d’une peur de décevoir et de la crainte d’être jugé négativement par autrui.
Un déficit d’affirmation qui s’avère courant. Pour preuve, les nombreux livres de développement personnel prodiguant des conseils pour s’affirmer. Pour le psychiatre Christophe André, auteur de nombreux ouvrages destinés au grand public, il existe trois freins principaux à l’affirmation de soi. Des freins qui empêchent d’exprimer un « non » franc face à une demande qui ne nous convient pas :
- La première de ces entraves est la peur de faire de la peine à autrui. En effet, répondre par la négative à une demande s’avère forcément décevant pour la personne qui l’émet.
- De plus, selon le psychiatre, nous avons souvent tendance à imaginer le pire : à savoir un « non » qui déboucherait sur un conflit. Et les disputes, nous sommes beaucoup à les éviter.
- Autre blocage psychologique de taille : l’anxiété sociale. Pour certains d’entre nous, la crainte d’un jugement négatif est si paralysante qu’elle entraîne même des symptômes physiques. Gorge serrée, palpitations… Ainsi, le moment de dire « non » est si éprouvant, qu’on préfère y renoncer en répondant « oui ».
Savoir dire « non »… pour mieux dire « oui »
Il en résulte, toujours selon Christophe André, un évitement naturel des situations « à risque« . En clair : nous avons tellement intégré le fait de dire « oui » à tout, que dire « non » devient de plus en plus difficile. Le risque est alors grand de se perdre dans les désirs d’autrui en ne parvenant plus à définir les siens… Car pour savoir dire « oui » avec authenticité, il faut d’abord apprendre à dire « non« .
Si savoir dire « non » s’avère donc compliqué pour beaucoup, ce refus est pourtant indispensable à l’expression de vrais « oui » formulés avec conviction. Si nos réponses aux sollicitations d’autrui sont toujours positives, alors comment affirmer son identité ? Reste à trouver les moyens adéquats d’exprimer ce « non » tant appréhendé. En réalité, savoir dire « non » sans vexer s’apprend. Ci-dessous quelques pistes de réflexion et plans d’action.
Savoir dire « non » sans culpabiliser, ça s’apprend !
Pour apprendre à dire « non » au travail comme dans la vie personnelle, il faut donc en premier lieu travailler l’affirmation de soi. Christophe André propose dans ses ouvrages quelques pistes pour s’affirmer… et enfin arriver à prononcer ce « non » tant redouté.
L’une d’entre elles consiste à s’entraîner à potentiellement « vexer« . Le « non » étant une réponse de prime abord dérangeante pour celui qui la reçoit, la crainte de celui qui l’émet est donc d’offusquer. Il convient ainsi de se placer régulièrement dans des situations « à risque », afin de se familiariser avec cette peur. Vous pouvez par exemple prendre part à plus de débats entre amis comme au travail.
Il ne s’agit pas de dire « non » pour dire « non », mais de ne pas dire « oui » lorsque l’on pense intérieurement « non »…
Vous n’êtes pas d’accord avec votre collègue au sujet du dernier film à l’affiche ? Dites-le ! Vous n’aimez pas le design du Apple MacBook Air 15 dont tout le monde parle ? Osez le dire ! Plus facile à dire qu’à faire, mais avec de l’entraînement, cela deviendra plus facile.
Bien sûr, il ne s’agit de s’opposer avec véhémence, mais simplement de donner son opinion, qui a autant de valeur que celles des autres. En répétant cet exercice d’affirmation de soi, celle-ci deviendra naturelle et le fameux « non » sera de fait moins tétanisant.
Dans son ouvrage « Dire non, ça s’apprend !« (Dangles, 1999), le thérapeute Dominique Fromm délivre également quelques conseils pour ne plus se sentir obligé de dire « oui ».
1. Connaître nos limites
Le premier de ces conseils consiste à connaître nos limites. En effet, comment savoir quand dire « non » lorsque l’on ne sait pas vraiment ce qui nous convient ou pas ? Commencez ainsi par clarifier dans votre esprit les situations dans lesquelles vous ne voulez plus vous retrouver et celles qui vous conviennent. Dans la vie personnelle, cela peut-être toutes ces fois où vous avez accepté une invitation, alors que vous n’aimiez pas forcément le programme proposé. Au travail, quels dossiers avez-vous accepté de traiter alors que vous n’étiez pas du tout à l’aise ? En d’autres termes : quels sont vos goûts, vos priorités, vos valeurs, etc.
2. Penser aux conséquences pour soi d’un « oui » contraint
Cela nous amène donc à ce second conseil : avant de répondre « oui » (alors que l’on pense « non »), pensez aux conséquences de cette réponse inauthentique. L’un des principaux blocages au « non » est de penser avant tout à l’autre : que va-t-il ressentir si je lui réponds par la négative ? C’est oublier que vous n’êtes pas responsable de la gestion des sentiments d’autrui. Si votre « non » est formulé sans agressivité, la personne qui le reçoit doit pour sa part apprendre à l’accepter.
3. Ne pas hésiter à formuler sa gêne du refus
Pour une meilleure acceptation de notre refus, il peut être très utile de formuler clairement sa gêne. Le but : faire comprendre à notre interlocuteur que nous ne refusons pas de gaieté de cœur. Vous pouvez par exemple expliquer : « J’espère ne pas te vexer, mais je n’ai pas envie de sortir de soir ».
4. Délivrer une justification claire
Livrer à autrui une justification claire est également préférable. Si trop d’explications laissent transparaître notre culpabilité, une clarification de notre décision permet à l’autre de mieux accepter notre refus. Par exemple : « Je ne souhaite pas sortir ce soir, car j’ai eu une semaine compliquée au travail et je suis fatigué ». Ou encore : « Je ne peux pas traiter ce dossier, car je suis déjà débordé et je ne pourrai pas y répondre dans les délais impartis ».
5. Il est toujours possible de revenir sur un « faux oui »
Pour finir, n’oubliez pas qu’il est toujours possible de revenir sur un « faux oui ». Cela ne s’apparente pas à une trahison, bien au contraire. En expliquant à autrui pourquoi vous revenez sur votre « oui », vous lui témoignez votre confiance en lui confiant vos ressentis. Par exemple : « Je t’ai dit oui, mais en y réfléchissant, cela ne me convient pas. J’ai encore du mal à dire non, c’est pour cela que j’ai accepté immédiatement, mais j’essaie de m’améliorer sur ce point »…
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La communication non violente à la rescousse du « non »
Nous venons de le voir, la communication est donc très importante pour dire « non » d’une manière qui aura plus de chance d’être acceptée par l’autre. Pour cela, la communication non violente (CNV) est une piste de réflexion intéressante à approfondir. Ce moyen de communiquer avec respect et bienveillance est enseigné notamment dans les situations de désaccord, voire de conflits déjà installés. Ses principes sont d’ailleurs très proches des conseils délivrés par les spécialistes pour savoir dire « non ». A savoir prendre conscience de nos ressentis, pour les verbaliser de la meilleure des manières possibles…